L’objet de ce propos consiste en une analyse des différents caractères des mains de départ au No Limit Texas Hold’Em basée essentiellement sur les travaux de David Sklansky. Il est bien sûr entendu que pour les joueurs.
Ayant quelque peu d’expérience et/ou de connaissances, le caractère simple voire simpliste de ce qui suit est déjà acquis depuis bien longtemps, du moins en toute logique. Ce propos vise donc essentiellement les joueurs inexpérimentés.
Cependant, il apparaît que, même si les concepts évoqués ci-après sont assimilés par la plupart des joueurs (les appliquant intuitivement ou non), les formuler rigoureusement et synthétiquement est une tâche loin d’être évidente.
Dans un premier temps, seront définies les notions de mains stables et mains dynamiques ainsi que de mains dominées. En effet, les travaux de théorisation portant sur hiérarchie des mains de départs au NLH par D. Sklansky s’appuient essentiellement sur ces notions.
Les groupes de mains de départ qu’il élabore dans son ouvrage « Hold’Em Poker for Advanced Players » seront recensés par la suite. Cette classification a été éprouvée après sa publication par la critique. Nous en verrons quelques exemples.
Enfin, une analyse succincte de la manière de jouer les mains de chaque groupe sera effectuée. Cela tombe sous le sens, mais ce propos n’est en aucun cas un dogme à suivre à la lettre qui permet de s’imposer à tous les coups à l’abattage. Les circonstances du coup devront absolument être analysées et prises en compte afin de prendre la décision adéquate à tout moment. En effet, une sélection judicieuse des mains de départ constitue une stratégie à élaborer préflop ; la stratégie à adopter au flop et postflop étant d’une toute autre nature.
INTRODUCTION Tout d'abord un petit tableau de choix des actions selon vos mains :
Il existe 1326 combinaisons possibles, cependant les mains de départ sont traditionnellement regroupées en 169 mains dès lors que l’on considère que rien ne distingue K◊ K♠ de K♥ K♣, ou 9◊ 8◊ de 9♥ 8♥ avant l’apparition du flop.
La primauté de AA vis à vis des 168 autres mains de départ est incontestable. De même, 72o a toujours été considérée, à juste titre, comme la plus mauvaise main de départ. Au cours des années 1970, et 1980 après la légalisation du Hold’Em en Californie qui a contribué au développement du Texas Hold’Em, est venu la théorisation de celui-ci en particulier sur la hiérarchie des mains de départ. Au delà d’une simple approche descriptive, de nombreux auteurs ont tenté d’élaborer une hiérarchie entre les mains de départ. Cependant, il apparaît aujourd’hui difficile de concilier une hiérarchie stricte des mains de départ avec le caractère dynamique inhérent aux hole cards qui n’est que renforcé dans les parties aux petites limites qualifiées de “loose games” (cas de 5 ou 6 joueurs présents au flop) du fait, justement, de la présence de nombreux joueurs au flop.
Parmi les mains de départ, il convient de distinguer 4 catégories. D’abord, les paires (premium, medium et small), puis les paint cards ou broadway (suited et offsuited), les connecteurs (suited et offsuited) et enfin les autres mains.
Les paires de AA à JJ sont des mains puissantes s’exprimant d’abord dans les jeux les plus serrés alors que dans les loose games, elles ont tendance à perdre en stabilité. Cependant l’espérance de gain de ces paires comme pour toutes les autres mains augmente dans les loose games. Les paires de JJ à 77 sont bien souvent les meilleures mains préflop, mais elles ont besoin d’un tableau favorable pour s’imposer. Les petites paires inférieures à 66 ne sont jouables préflop que sous certaines conditions dont les principales sont l’absence de relance et la présence d’au moins 5 joueurs au flop.
Les paint cards ou broadway sont les mains composées de deux cartes supérieures ou égales à 10. Ici, la meilleure main est AKs, cependant sa valeur s’érode très fortement dès l’apparition du flop. Pour les autres mains, KJs appartient comme KQs aux mains qualifiées de “dominated hands”. De ce fait, de nombreuses autres combinaisons entre dans la catégorie des dominated hands comme KQ. Ainsi toutes ces mains, assorties ou non, sont à jouer précautionneusement.
Les connecteurs sont les mains du type de 87. Ils suivent d’une manière générale le régime applicable aux petites paires en ce qui concerne le jeu pré-flop, même s’ils résistent moins bien dans les jeux agressifs. S’il convient de privilégier les connecteurs assortis, certains comme B. Ciaffone préfèrent les connecteurs non assortis qui sont plus faciles à coucher post flop. Dans tous les cas, ces mains sont dites spéculatives et elles ne doivent être jouées que lorsque les implied odds sont importants, c’est à dire dans les loose passive games.
DYNAMIQUE ET STABILITÉ DES MAINS DE DÉPART Le nombre d’adversaires, leur style et leur position (entre autres facteurs) influencent considérablement la valeur des mains quel que soit leur rang dans la hiérarchie des mains de départ.
Pour évoquer la dynamique des mains au Texas Hold’Em, on pourrait énoncer un principe fondamental de la physique :
« Tout système tend à évoluer spontanément vers son état énergétique le plus faible. »
Secondé par :
« Tout système, pour évoluer vers un état énergétique supérieur, doit se voir soumettre l’application d’une énergie extérieure. »
Au Texas Hold’Em :
Toute pocket paire, aussi forte soit elle, tend à ne devenir qu’une simple paire.
Secondé par :
Toute main, pour donner une combinaison supérieure à la paire, doit se voir soumettre l’application du flop ou du board.
Illustration : Une main comme AA tend à perdre en stabilité au flop, les mains comme 87s ne tendent qu’à gagner en stabilité après l’apparition du flop.
Les paires comme AA/KK/QQ/JJ sont les mains les plus stables. En effet, dans plus de 95% des cas KK est la meilleure main préflop et plus de 80% des flops sont favorable à AA et KK. Par contre la situation de QQ et JJ est plus instable puisque si ces mains sont souvent les meilleures mains préflop, elles ne trouvent un flop favorable qu’une fois sur deux en loose games. Dès lors, le premier aspect de la dynamique des mains fait apparaître une dichotomie entre la valeur préflop et la valeur postflop des pockets paires. Ce constat est d’autant plus renforcé que la paire est faible car ce type de paire a le plus souvent, aux petites limites, besoin de s’améliorer pour s’imposer. Cependant, les paires, comme les mains de type KQo ne perdent pas de valeur en loose games, au contraire elles gagnent de la valeur mais moins que d’autres mains comme AQs qui est encore plus performante en loose games qu’en tight games. Ainsi, c’est parce qu’elles sont assez instables au flop, que les paires, en particulier QQ-99, doivent être jouées agressivement préflop.
Ensuite les mains comme AK/AQ sont des mains plus sensibles et plus dynamiques. AK en particulier, est dans bien des cas la meilleure main préflop et même face à une paire comme JJ, AK n’est pas réellement handicapée préflop. Cependant, la valeur réelle d’AK ne se réalise qu’après l’apparition du flop. En effet, préflop, AK ne doit, sauf exceptions, être couchée que face à AA ou KK. Cependant au flop, il convient dans la majorité des cas de dévaluer AK. Si en short-handed ou en tight games, il est possible sous certaines conditions de pousser AK à la turn avec 6 outs, il faut souvent, en loose games, folder deux overcards au flop car ces mains n’ont trop souvent que 3 effective outs. D’autre part, une main comme AQ est particulièrement dynamique. La plupart des joueurs ont conscience que la nature du flop influence très fortement la valeur de AQ, ces mêmes joueurs n’ont souvent pas conscience du dynamisme de AQ préflop. Face, à un tight raiser préflop, AQ est facilement foldable. Par contre AQ mérite une relance après 4 ou 5 limpers pour créer un 3-way pot ou un duel. Le nombre de joueurs entrés dans le coup impacte donc sur la valeur des mains de départ.
Les médiums ou les petits connecteurs sont les mains les plus dynamiques. En effet, 87s est une main spéculative qui n’a qu’une faible valeur préflop et elle ne peut être jouée que lorsqu’elle dispose d’une cote implicite suffisante. Par conséquent, 87s est une main qui ne doit être jouée que dans les multiway pots. 5 callers préflop sont nécessaires pour donner une côte suffisante, et seul un flop favorable, flush Draw ou straight draw, permet de poursuivre le coup.
En conclusion, la valeur des mains est relative et doit être constamment réévaluée tout au long du coup. Chaque action de chacun des adversaires à un effet positif ou négatif sur la valeur de la main.
MAINS DOMINÉES La pratique du Texas Hold’Em accorde une importance fondamentale au kicker. Est évoquée ici, la nécessité d’éviter de jouer ces “trouble hands” lorsque le joueur n’a pas une faculté d’analyse suffisante (souvent due au manque d’expérience) qui lui permettrait d’outplay ses adversaires postflop. Appartiennent classiquement à la catégorie des mains dominées AQ-AT/KQ-KJ/QJ et JT. Par extension, toutes les mains sont susceptibles d’être dominées mais une attention particulière doit être apportée aux AXs et KXs.
Une main dominée se définit comme une main ne disposant que de trois outs pour s’imposer face à une main supérieure. Un exemple classique est le duel entre AK et AQ. Si AQ est dans de nombreuses situations une très bonne main, AK est favori à 3 :1 contre AQ. La situation est pire lorsque le joueur détient QJ alors que son adversaire a reçu QQ. Ainsi, le principal problème lié aux mains dominées provient du fait que même lorsqu’elles s’améliorent, cette amélioration n’est pas forcément suffisante pour permettre à la main de s’imposer.
En pratique, il importe donc de ne pas s’engager dans un coup avec une main qui est dominée préflop. Pour ce faire, la seule solution consiste, dans la mesure du possible, à appréhender les habitudes d’open raise de ces adversaires. Par exemple, si vous détenez AT ou QJ en middle position et que l’open raiser UTG est un tight raiser, il est inutile de rentrer. En effet, si le raiser est assez tight, il a au minimum {TT, AQs, KQs, AQo}. Dans cette situation, une seule main, QJ, à une chance sur deux de s’imposer contre une seule des mains de la hand range d’un tight raiser, TT. De ce fait, un bon joueur doit avoir la discipline de ne pas rentrer sans avoir au moins {JJ, AKs, AKo}. Si le joueur accepte de se soumettre à cette discipline, c’est alors son adversaire qui sera dominé dans la plupart des situations. A contrario, AJ, qui est pourtant une trouble hand, peut être une bonne main pour suivre un early raise dès lors que le raiser est plus loose pouvant relancer avec une hand-range plus large type {66+, A8s+, KTo+, QJs+}. Ainsi, avant de jouer une main dominée, il convient de déterminer le profil du raiser et plus généralement le profil de chacun des adversaires.
Parmi les autres mains, il faut signaler à titre principal les AXs qui bien que jouables sont souvent surestimés par la plupart des joueurs. Ces mains n’ont de valeur qu’en tant que drawing hands.
Savoir folder les dominated hands est un réel avantage. Cependant, il ne faut pas pour autant folder systématiquement ces mains. En particulier en loose games, ces mains ont une réelle valeur en tant que drawing hands et elles doivent être jouées à ce titre. En effet, obtenir la top paire avec une dominated hands n’assure en général que la second best hand au flop avec peu de chance d’amélioration. Enfin, le concept de domination perd d’autant plus de valeur que l’on monte de limites ou que le nombre de joueurs est restreint.
CLASSIFICATION DES MAINS DE DÉPART AU NLH PAR DAVID SKLANSKY Les travaux de D. Sklansky depuis 1976 ont visé à rationaliser l’approche théorique des mains de départ. Le système de référence des mains de départ est celui présenté dans « Hold’Em Poker for Advanced Players », ou dans « Small Stakes Hold‘Em » pour ce qui concerne la sélection des mains de départ en loose games. D. Sklansky et M. Malmuth ont élaboré une théorie des mains de départ, le ” starting hands ranking”, reposant sur l’existence de 8 groupes de mains de départ. Le groupe 1 représente les meilleures mains, jouables dans la quasi-totalité des situations, et le groupe 8 rassemble les mains jouables dont l’espérance de gains est la plus faible, voire négative dans la plupart des situations. La notion de groupe est particulièrement utile pour simplifier les analyses et les réflexions. Cependant, au sein d’un même groupe sont présentes des mains avec des caractéristiques très différentes. Ainsi, lors d’analyse spécifique, la notion de groupe devient caduque. Il en va ainsi, par exemple, de 98s catégorisée en groupe 4 mais qui dans de nombreuses situations suit le régime des mains des groupes 6 et 7.
En voici la teneur.
Groupe 1: AA, KK, QQ, JJ, AKs
Groupe 2: TT, AQs, AJs, KQs, AK
Groupe 3: 99, JTs, QJs, KJs, ATs, AQ
Groupe 4: T9s, KQ, 88, QTs, 98s, J9s, AJ, KTs
Groupe 5: 77, 87s, Q9s, T8s, KJ, QJ, JT, 76s, 97s, AXs, 65s
Groupe 6: 66, AT, 55,86s, KT, QT, 54s, K9s, J8s, 75s
Groupe 7: 44, J9, 64s, T9, 53s, 33, 98,43s, 22, KXs, T7s, Q8s
Groupe 8: 87, A9, Q9, 76,42s, 32s, 96s, 85s, 85, J7s, 65, 54, 74s, K9, T8
Il semble évident à tout joueur expérimenté que cette classification, après analyse, peut être soumise à débat ou critiques. Un essai publié sous le nom de plume d’Abdul Jalib par M. Hall, tout en n’étant pas une remise en cause des travaux de D. Sklansky vient compléter le système de ce dernier.
L’analyse de A. Jalib, remet en cause deux aspects des travaux de D. Sklansky que sont la valeur des paires et des suited connector. En premier lieu, l’essai de M. Hall remet définitivement en cause un des mythes du poker qu’est l’importance des suited connectors. En effet, les premières études consacrées aux mains de départ reprenaient une vieille croyance qui voulait que JTs soit au moins une aussi bonne main qu’AKs. Le mythe JTs a perduré y compris chez D. Sklansky jusqu’en 1998. D’une manière générale, D. Sklansky tend à surclasser les suited connectors et à sous estimer les paires médianes comme JJ.
Le caractère assorti ou non de la main souffre aussi de contestation. D. Sklansky accorde une importance particulière à ce paramètre mais il est clair que si les mains assorties gagnent plus de valeur que les mains dépareillées en loose games, cela ne signifie pas que les mains dépareillées perdent de la valeur. Il n’y a donc pas lieu, malgré les propos de D. Sklansky de retirer les mains offsuited de la sélection préflop, qui seraient instables ou perdraient de la valeur en loose games.
Le jeu en loose games fait apparaître clairement le concept de dynamic hand value, qui justifie la stratégie visant à jouer davantage de mains dans ces conditions. En effet, si les mains de départ peuvent voir leur valeur varier pré-flop, elles varient surtout au flop ce qui peut souvent valoriser des mains du type T9s au détriment des mains des premiers groupes.
Ainsi, pour la plupart des hole cards, la seule valeur des cartes est insuffisante pour déterminer si la main doit être jouée ou non. Plusieurs facteurs extérieurs doivent accompagner la prise de décision.
En conclusion, la hiérarchie des mains de départ ne constitue pas une structure rigide. En effet, les groupes de mains de départ de D. Sklansky, s’ils prennent en compte des éléments fondamentaux comme la position, sont parasités par les interactions entre les différentes mains et par les joueurs qui par leurs erreurs faussent l’optimum sur lequel est fondé cette théorie.
Un exemple très évocateur concerne les relations entre AK, JTs et 22. Il apparaît que si AK domine largement JTs dans 63% des duels, JTs dominant 22 une fois sur deux, dans le même temps 22 sort triomphant de la plupart de ses duels avec AK !
Il ne faut pas surestimer l’importance de la sélection des mains de départ, il est difficile d’évaluer la valeur d’une main de départ et les groupes de mains de départ sont d’abord destinés aux joueurs inexpérimentés, à terme les joueurs doivent viser à s’écarter de cet esprit dogmatique.
ANALYSE DES GROUPES DE MAINS DE DÉPART ÉLABORÉS PAR D. SKLANSKYGROUPE 1Un joueur à 2.1% de chance de recevoir une des 5 mains du premier groupe. Toutes les pocket paires du premier groupe n’ont pas la même valeur et AK est une main qui bien que puissante préflop reste très vulnérable et fragile si elle ne s’améliore pas au flop.
Les pocket pairs sont incontestablement les meilleures mains de départ en tight games comme en loose games même si, en loose games, AA-JJ perdent en stabilité. En général, il convient de jouer agressivement préflop en relançant avec AA et KK, cependant, en tight games, un joueur en early position avec AA-KK pourra limp-reraiser au lieu d’open raiser. En middle position, il est nécessaire de raiser / reraiser avec ces mains dès qu’il y a déjà un caller pour décourager les adversaires qui se trouve à gauche de AA-KK.
D. Sklansky estime que le principe selon lequel il faut toujours relancer QQ en early position ne souffre d’aucune exception. De même, au big blind, il est également recommandé de raiser-reraiser avec QQ. C’est parce qu’elle est instable en multiway qu’il est nécessaire de jouer QQ agressivement préflop.
JJ est une bonne main qui à l’inconvénient d’être très dynamique. Ainsi, avec un flop JXX, le set ne suffit à remporter le pot que dans 75% des cas. Par ailleurs les simulations font apparaître qu’en loose games, si JJ est une overpaire au flop dans 1/3 des flops, JJ ne s’impose à l’abattage que dans 20% des cas et dans 14% des cas s’il y a une overcard au flop. Ensuite, avec deux overcards au flop, JJ a une e.v. négative. Dès lors, il est souvent nécessaire de raiser préflop en early position en tight games. En loose games, lorsque le joueur a la certitude qu’il y aura plus de trois callers, D. Sklansky recommande de se contenter de caller. A contrario, pour L. Krieger, il n’y a pas de situation ou ne pas raiser en early position avec JJ peut trouver une réelle justification. En middle position, même après un raiser et un limper, il est convenable de reraiser en tight games en particulier pour acheter le bouton dès lors que le early raiser raise avec AJs/KQs/AQo. Par ailleurs, il est possible de folder JJ préflop si le pot à été raiser et reraiser. Ainsi, JJ est une très bonne main qui reste difficile à jouer. Selon les analyses de poker room, JJ obtient de moins bons résultats en early position que AKs. Cependant, en tight games, JJ retrouve sa réelle valeur.
AKs est une très bonne main qui impose de raiser et reraiser préflop. Cependant, en tight games, il est possible de limper avec AKs dans un tiers des coups. Cependant, certains comme J. Juanda recommande de limper plus d’une fois sur deux avec AKs pour maintenir les AX. En head up par exemple AKs n’a pas besoin de s’améliorer pour s’imposer. Par ailleurs, en late position après un early raiser, il est rarement possible de faire autre chose que folder AKs. En effet, face à un early raiser qui aurait QQ/AKs/AKo, AKs n’a d’autres choix que de folder d’autant plus que le joueur sera ensuite out of position. En conséquence, AKs est une bonne main qui est la meilleure main préflop dans 1/3 des cas mais qui, une fois sur deux est condamnée à s’améliorer puisqu’un joueur détient une pocket paire.
En conclusion, AA-JJ/AKs sont incontestablement les meilleures mains de départ en holdem. Malgré tout, il sera parfois nécessaire de folder ces mains préflop, en particulier JJ.
GROUPE 2Un joueur à 2.3% de chance de recevoir une main du groupe 2 et 4% de chance de recevoir une main des deux premiers groupes. Les mains du groupe 2 sont de très bonnes mains mais AQs et surtout AJs et KQs restent des mains très fragiles.
En premier lieu TT est une pocket paire qui avec JJ-88 appartient aux middle paires. Elle se comporte bien en head up ou en short-handed mais elle est très instable en loose games. La première limite de TT est qu’elle peut être dominée préflop face à une autre pocket paire ce qui survient dans 15% des cas. Ainsi TT doit être jouée d’abord contre un ou deux adversaires dans la mesure où elle peut s’imposer sans s’améliorer. Dès lors, raiser préflop est raisonnable si le raise permet de limiter le nombre d’adversaires. A défaut, où après plus de trois callers, il est préférable de caller et de jouer TT avec l’idée d’aller chercher le set au flop.
AQs, AJs et KQs sont des mains dominées. La plupart des joueurs ont conscience qu’AJs et KQs n’ont souvent que deux ou quatre effectives outs et sont dès lors difficiles à jouer en loose games. Par contre, le rang de classement de ses mains est justifié par leur bonne stabilité en tight games. Ainsi, ces mains devront souvent être foldées préflop, mais elles peuvent également être largement profitables contre un maniac. Il est donc possible de reraiser avec ces mains pour isoler un maniac. Jouer AQs est plus complexe. AQ, même assortie, est une main dominée. Préflop, en early position, il convient de raiser dans plus de 60% des cas en loose games. Après un early raiser, il convient de folder si le raiser à TT/AQs/AKo/. Après un middle raiser, la meilleure solution consiste à caller, et après un late raiser, reraiser est généralement la meilleure solution. Ainsi, AQs doit être jouée soit en head up soit en multiway dès lors que le pot atteint une taille conséquente.
Préflop, peu importe le nombre de limpers, il est toujours possible de raiser avec AKo. Limper avec AKo ne doit être justifié que par la volonté de piéger AJ ou AT. Après un tight raiser, il est souvent nécessaire de folder AKo. De même si un joueur tight raise en early suivi par deux tight callers ou reraiser par un joueur tight, l’e.v. de AKo est nulle, dès lors folder est toujours une bonne option. Après un tight raiser, jouer AKo est généralement un mauvais choix car un raiser ayant au minimum TT est favori à 3 :1 et hors des paires le raiser à également AK une fois sur quatre. Seul le fait d’être au bouton peut justifier de caller avec AKo face à un tight raiser en early position. Par contre, après un tight raiser ayant QQ/AKs/AKo et un loose caller, AKo s’impose dans 37% des cas, il est donc possible de caller.
Ainsi, même de très bonnes mains comme AQs ou AKo doivent parfois être foldées préflop. Cependant, en loose games, une main comme AQs est très performante et devra être jouée très agressivement.
GROUPE 3Le groupe 3 regroupe des mains très hétérogènes. Chacune d’elles a ses spécificités et elles n’ont comme points communs que leur stabilité en tight games. Les mains du groupe trois représentent 2.6% des 1326 combinaisons possibles.
En premier lieu, 99 est une middle paire qui est jouable dans les mêmes limites que TT ou même JJ. D’une manière générale, il convient de limper en early position et d’ open raiser en middle ou late position. Par ailleurs, après un raiser, il est possible de caller si il y a déjà 3 callers.
JTs comme 54s a 20% de chance de trouver un bon tirage au flop. Par ailleurs, JTs est favori dans ses duels contre les petites pocket paires jusqu’à 55. Ce sont ces bons résultats qui ont conduit de nombreux joueurs à surclasser JTs au cours des dernières décennies. En effet, si D. Sklansky considère que JTs est la douzième main de départ, elle n’est que la 26ème main pour M. Caro et la 23ème pour A. Jalib. Ce dernier considère même que JTs doit être placée derrière KTo. G. Carson fait une analyse similaire en considérant que JTs entre avec des mains comme KTs dans la catégorie des “dominated power hands”.Effectivement, dans de nombreuses situations, JTs devient injouable au flop. P. Samuel a mis en évidence que JTs ne trouve que 25% de flops favorables, soit à peine plus que 66 qui est placée en tête du Groupe 6 de D. Sklansky. En outre, en multiway, si JTs obtient davantage de straight draws que KTs, les straight draws restent des mains fragiles. Malgré tout, JTs reste une bonne main qui obtient de bons résultats contre les maniacs et plus généralement contre des mains du type AXs. Ainsi, s’il est déconseillé de raiser en early position, JTs reste une main jouable en late position après plusieurs limpers. Et, il est possible de raiser avec JTs en middle position en loose passive games.
Les mains suivantes QJs, KJs, et ATs sont des mains qui doivent être foldées dans la plupart des situations. Il est cependant possible d’open raiser en middle position ou de caller en loose games. En outre, raiser au bouton avec KJs permet de ruiner la cote implicite des limpers. Cependant, il reste préférable de caller ou checker depuis les blinds car ATs sera difficile à jouer au flop out of position.
AQo est une bonne main, et de nombreux joueurs estiment que AQo et AKo ont une valeur comparable. Or s’il n’y a que 6 mains supérieures à AKo (AA-KK), il y a 30 mains supérieures à AQ (AA-KK-QQ-AKo-AKs). Dans la plupart des cas, il est nécessaire de folder AQo après un tight raiser. Mais, contre un steal raise, il est nécessaire de reraiser. Après un ou deux limpers, il reste possible de raiser, mais caller permet de manipuler le pot et de maintenir des mains come QJs dans le coup.
En conséquence, si en tight games il est nécessaire de raiser préflop, en loose games, caller avec AQo est généralement la meilleure solution lorsque le raise ne va pas permettre de limiter le nombre d’adversaires.
GROUPE 4Les mains du groupe 4 sont de bonnes mains qui ont cependant besoin de conditions favorables pour être jouées profitablement. Souvent, c’est la position du joueur ou la nature, tight ou loose, de la table qui invite les joueurs à jouer ces mains.
En premier lieu T9s est une drawing hands, cependant D. Sklansky et M. Malmuth précisent que cette main peut être jouée profitablement même en early position. Ensuite, il précise que T9s est une main performante contre un loose raiser qui peut avoir 66/A6s/…/. D’une manière générale, T9s serait jouable en early position car elle est facile à folder sur un flop défavorable. En outre, T9s obtient généralement de meilleurs résultats que les KX et réalise plus de quinte que des mains comme KQ. A contrario, T9s ne serait pas une main de head up et devrait généralement être foldée lorsqu’un joueur reraise dès lors qu’il détient 88/ATs/KQs/…/.
KQ est une main qui obtient de meilleurs résultats en loose games qu’en tight games. UTG, KQ est une main qui doit être foldée ou raisée, limper avec KQ à une e.v. négative en tight games. De même, après plusieurs limpers, folder KQ est rarement une erreur. KQ obtient ses meilleurs résultats lorsque le joueur open raise en middle ou late position. QTs est une main qui, en loose games, est jouable avec les mêmes restrictions que celles imposées à KQ.
AJo est une main marginale en early position en tight games. Par contre, elle est jouable en loose games. Après plusieurs limpers, AJo est jouable contre des limpers tight agressive ou après un limper loose agressif. Dans ces derniers cas il est même généralement possible de raiser si le pot est déjà important. Dans les jeux les plus loose, AJo est jouable en early dès lors que le joueur à la conviction qu’il y aura plus de quatre joueurs au flop.
KTs est une main qui illustre parfaitement le concept de dynamique des mains et de domination. KTs est souvent, à juste titre comparée à AJs. Cependant, si en tight games AJs obtient de meilleurs résultats, en loose games KTs est incontestablement la meilleure des deux mains. Préflop, D. Sklansky considère qu’un open raise est recommandé une fois sur trois avec KTs mais que reraiser est souvent une erreur avec KTs. En loose games, les bons résultats de KTs trouvent leur origine dans le fait que de nombreux joueurs jouent les KXs et parce que KTs obtient des couleurs et des quintes assez stables puisqu’elles s’imposent dans plus de 80% des cas.
Les mains du groupe 4 sont des mains qui bénéficient généralement d’un meilleur classement de la part des auteurs qui proposent des chartes de mains de départ applicables en loose games et aux basses limites.
GROUPE 5Les petites paires de 55 à 77, sont à jouer d’abord pour leur potentiel de set (7.5 :1). Dès lors il est possible de limper même en early position en loose passive games. Cependant, il est préférable de caller à partir des middle positions. Enfin, en late position, il est possible de raiser après 5 ou 6 limpers, car avec ces paires comme avec les big suited, il est préférable de créer un gros pot préflop. D’autre part, il est même possible de raiser après 3 callers dès les middle positions.
Les suited connectors comme 87s sont de bonnes mains en loose games mais certains comme B. Ciaffone ont une profonde aversion pour ce type de mains. D’une manière générale, elles doivent être jouées en late position dans un pot non raiser. Cependant, il est possible dans 15% des cas de raiser avec ce type de main en early position même en tight games.
Cette stratégie est justifiée par B. Baldwin par la nécessité de varier la sélection des mains de départ. Il sera difficile pour les adversaires de lire que le joueur à raisé préflop en early position avec 87s. Par suite, il est toujours déconseillé de caller un raise avec ce type de main même si le pot a déjà un volume important. Cependant, comme le précise R. Cooke, face à des joueurs assez weak postflop, il est possible de caller un raise car la cote implicite reste élevée en présence de ce type de joueur malgré le raise intervenu préflop. Ce type de main trouve un bon tirage, straight draw ou flush draw, sur 15% des flops.
Les mains du type KJ/QJ sont généralement injouables après un early raiser ou un tight UTG limper. En effet, après un early raiser et un limper, KJ se retrouve généralement à 4 :1 même sur un flop a priori favorable comme QT5. Cependant, en middle ou late position, D. Sklansky considère qu’un open raise est la meilleure stratégie. De même, après un ou deux limpers, la top paire au flop est généralement la meilleure main. Ainsi, ce type de main doit d’abord être joué en multiway pots.
Les AXs sont des mains qui ne sont jouables que dans les pots à gros volume non relancés. Ainsi, Une main comme A◊4◊ doit généralement être foldée en late position après un raiser et 4 callers. Par ailleurs, si de nombreux joueurs raisent les AXs après plusieurs limpers, il s’agit généralement d’une erreur car les AXs restent des mains spéculatives qui ne doivent voir le flop qu’à bas prix dans un multiway pot. Ainsi, c’est bien la cote implicite qui conduit à jouer ce type de main. Or, doubler le prix préflop ne conduit pas à doubler la taille du pot final et impacte donc négativement sur la cote implicite. Seule la présence de plus de 6 limpers peut justifier un raise avec un AXs. En late position, si le joueur est first in, il faut en général relancer avec les AXs. Et, une main comme A9s peut être utilisée pour reraiser depuis les blinds contre un probable vol de blinds. En tight games, il est possible de jouer A8s UTG selon A. Jalib qui met en évidence que face à un joueur qui raise avec A8s UTG, tout joueur qui call le raise avec moins de AQ/…/ commet une erreur. Ainsi, les AXs sont de bonnes mains mais elles ne doivent pas être surévaluées.
Les mains du groupe 5 sont dès mains jouables depuis les middle positions et obtiennent l’essentiel de leurs résultats en multiway pots. En outre, la plupart de ces mains sont également adaptées pour défendre les blinds face à un possible stealer.
GROUPE 6Les mains du groupe 6 sont des mains qui ne génèrent qu’un faible profit. Cependant, elles restent profitables et méritent d’être jouées sous certaines conditions.
ATo est probablement la meilleure main du groupe en heads up. En outre, en tight games, il est même possible de raiser depuis les premières positions. De ce fait, D. Sklansky admet que ATo aurait sa place dans le groupe 5. Cependant, la place de ATo dans le groupe 6 reste justifiée par les faibles résultats de ATo en multiway pot. Cependant, il reste possible de raiser avec cette main, mais seulement après quelques limpers.
En ce qui concerne QT et KT, la stratégie à appliquer est la même que celle à utiliser avec KJ pourtant classée dans le groupe 5. Ces mains ne générant qu’un faible profit, elles ne doivent être jouées que lorsque les conditions sont favorables.
Les petites paires 66 et 55 suivent un régime proche de 77 ou 88. Ce type de main est à privilégier dans les jeux les plus passifs car il est difficile de jouer ces petites paires avec des joueurs qui ont souvent recours au semi-bluff. Par contre, ces mains obtiennent de bons résultats face à des joueurs weak postflop qui vont contribuer au pot même lorsque le joueur obtient un set. Cependant, d’une manière générale, un pot odds de 5 :1 est nécessaire pour jouer ces mains. Si la cote de trouver un set au flop est de 7 :1, la présence de 5 limpers est suffisante du fait d’une côte implicite élevée.
En conclusion, parmi les mains du groupe 6, les petites paires restent probablement les plus faciles à jouer, les autres mains comme QT ou KJ devront quand à elles être jouées avec beaucoup de précaution.
GROUPE 7Les mains du groupe 7 sont les dernières mains jouables. En effet, les mains du groupe 8 ne sont jouables que marginalement et dans la plupart des cas depuis les blinds ou en bluff ce qui n’appelle pas de remarques particulières.
Les petites paires 44-22 sont des mains marginales, qui ont un léger avantage contre les mains comme AK, mais qui ne sont pas favorites contres les meilleurs suited connectors comme JTs. En outre, contrairement à D. Sklansky, A. Jalib considère que seule 55, au minimum, permet de reraiser en late position après plusieurs limpers.
Ensuite, les mains comme 64s sont des drawing hands qui obtiennent de biens moins bons résultats que les suited connectors. Ainsi 64s est à 7.5 :1 de trouver un flush draw au flop et à 13 :1 de trouver un straight draw au flop. Il en va de même avec 43s qui est, comme souvent avec les suited connectors, surclassé par D. Sklansky qui range 43s devant les KXs. En effet, si 43s est généralement foldée et permet dans de rares occasions de limper, une main comme KXs permet quant à elle de raiser régulièrement après 3 ou 4 loose limpers. Dès lors il apparaît que D. Sklansky accorde trop d’importance au concept de domination ce qui dévalorise les drawing hands.
Dans « Hold’Em Poker for Advanced Players », D. Sklansky préconise de jouer les mains des groupes 7 et 8 après plusieurs limpers. Cependant, D. Sklansky a ultérieurement indiqué qu’il convenait d’exclure J9o, T9o et 98o de ces groupes et de ne pas les jouer après quelques limpers.
Les mains du groupe 7 peuvent être foldées dès lors que le pot a été raisé ou lorsqu’il y a moins de 4 limpers. Dans les autres cas, il est possible de caller préflop pour un small bet. Ainsi, les mains du groupe 7 sont à réserver aux multiway pots. Hors du cas particulier des KXs, il est difficile de pouvoir jouer agressivement avec ces mains.
CONCLUSIONSi la sélection des mains préflop au Texas Hold’Em est prépondérante, elle n’en reste pas moins subjective. En effet, certains joueurs ont une affection particulière pour certaines d’entre elles (la plupart du temps de part leur souvenir de pots remportés en les détenant), le propos n’est donc pas ici de les dissuader dans leur entreprise. Car toutes les mains sont jouables à condition de savoir les jouer. Mais savoir les jouer demande une certaine expérience. Une expérience souvent acquise certes en accumulant les coups gagnants mais aussi les perdants. Car comme le dit un célèbre écrivain nait irlandais un jour de 1854:
« L'expérience est le nom que chacun donne à ses erreurs »
Oscar WILDEDonc passionnés de poker, débutants ou plus confirmés, éprouvez toutes les situations qui vous semblent instructives, même les plus délicates, votre jeu n’en deviendra que plus riche.